Histoire de l’Art Brut
Jean Dubuffet
Jean Dubuffet est né au Havre en 1910.
Après avoir suivi les cours de l’Académie locale, il déménage à Paris en 1918 pour étudier à l’Académie Julian et devenir ainsi peintre. C’est une décision douloureuse et plusieurs fois rétractée. Elle devient définitive à partir de 1942 après une longue période passée à Buenos Aires et quelques années passées dans l’entreprise familiale.
Dubuffet est attiré par les oeuvres des peuples primitifs, par les graffitis peints sur les murs, par les images spontanées et naturelles des enfants et des malades mentaux. Il s’agit d’un très grand répertoire qu’il baptise avec le nom de “Art Brut” en 1945 et qu’il approfondira dans ses écrits “Cahiers d’Art Brut”.
En 1944, il a sa première exposition personnelle à la galerie René Drouin à Paris Dans la même période il va en Algérie où il est inspiré par les nombreuses stimulations picturales. Pendant la guerre Dubuffet s’intéresse à ce qu’il appelle “peinture de la vie moderne”. Il se dédie alors aux “hautes Pâtes” (1945-1946) et aux portraits (1946-1949), qui par leur matière peuvent bien appartenir à l’art informel. En 1946 il publie le Prospectus aux amateurs de tout genre où il précise sa pensée.
En 1947 il monte une exposition au Foyer de l’Art Brut avec les dessins enfantins et ceux des malades mentaux , suivie par une exposition dans la Galerie Drouin à Paris. L’année suivante il fonde la Compagnie de l’Art Brut avec André Breton, Jean Palau et Pierre Matisse.
Entre 1949 e 1969 il se dédie aux différents cycles de ses œuvres: paysages grotesques, Corps de dames, sols et terrains, assemblages de matière. Les phénomènes de texture de la matière où il emploie des matériaux très variés comme les collages d’œuvres précédentes, journaux, végétaux et animaux comme les papillons. En 1960 il s’intéresse à une œuvre musicale expérimentale avec Asger Jorn.
Dans les mêmes années il fait de nombreuses rétrospectives en Europe et en Amérique à Zurich, Amsterdam, Paris, New York et même au Tate Gallery à Londres et au Guggenheim à New York.
Jean Dubuffet, peintre, fonda le Foyer de l’Art Brut à Lausanne et par la suite la Fondation de l’Art Brut.
Il fait un choix précis et trouve le noyau, ce qu’il appellera l’”Art Brut” auquel d’autres sources créatives s’ajouteront comme par exemple l’art des medium , des paranormaux, l’art des prisonniers, les créations autodidactes inspirées. Avec la force d’un seul mot “Art Brut”, il donne vie à une catégorie nouvelle, un défi dans les milieux artistiques occidentaux. Il a créé l’Art Brut même si avant lui des médecins, des psychiatres, criminologues et poètes s’étaient intéressés et avaient collectionner des œuvres de malades mentaux et de personnes marginales.
Pendant l’été 1945 Dubuffet se met à la recherche d’une expression artistique anonyme, indéfinissable. Il l’appellera en juillet ce cette année-là l’Art Brut”. Il collectionne des œuvres de tout genre, provenant de personnes obscures, ayant une inspiration spontanée, animées par des fantaisies, des délires et surtout qui n’ont aucune connaissance de l’art catalogué. Ce sont des peintures, dessins, statues, objets de tout genre, uniques et qui nous rappellent les origines de l’homme, ce sont des inventions spontanées et individuelles. Ce sont de fortes pulsions, des états d’âme privés, qui n’ont aucun but lucratif, qui évitent les conventions, voilà quelques caractéristiques de ces artistes.
L’initiative l’Art Brut est un phénomène idéologique.
L’Art Brut indique le refus de la discrimination propre à la mentalité mure: celle du réel et de l’irréel, ou autrement dit du principe intellectuel et sensuel. Les artistes de l’Art Brut ne se sont pas fait voler leur enfance et ils se sont agrippés à un univers où la réalité et le désir ne sont pas vécus comme opposés.
L’artiste de l’Art Brut ne conçoit pas la peinture comme l’autre face du monde en désordre mais comme une sorcellerie qui l’aide à se réconcilier avec le monde. Il refait le monde à son gré. Il ne s’agit pas d’une esthétique mais d’une dernière chance de survie.
L’Art Brut de Dubuffet se révèle tout d’abord provocateur et difficile à soutenir. Il définit l’artiste de l’Art Brut comme un autodidacte marginal qui élabore une nouvelle technique, iconographie, un style et une technique pour souligner le caractère unique et original de l’œuvre. Chacun travaille seul et dans l’anonymat. Le destinataire de l’œuvre n’existe pas dans la pensée de l’artiste et l’aspiration à la clameur sociale est absente. L’artiste ne considère pas son œuvre comme faisant part du domaine de l’art, sa production se développe en dehors de tout cadre établi. Chacun a une esthétique personnelle et ne fait pas partie d’un courant artistique.
Dubuffet a réussi à formuler la spécificité de cette créativité marginale et clandestine. L’Art Brut est le premier signe de fracture dans le domaine culturel occidental. Dubuffet est l’artiste d’un parcours atypique. C’est par excellence une personne créatrice, un artiste et un collectionneur depuis son enfance. C’est seulement en 1942, après avoir travaillé dans l’entreprise familiale qu’il a cédé au démon de l’art ayant les moyens nécessaires pour peindre librement. Il évite l’académisme et le snobisme de l’avant-garde parisienne. Il veut faire repartir la peinture vers des horizons totalement neufs et sera reconnu comme un artiste international et entrepreneur. Il a toujours maintenu intacte l’indépendance qui a caractérisé sa conduite et sa pensée.